
POUR RÉDIGER CET ARTICLE, NOUS AVONS BÉNÉFICIÉ DU SOUTIEN ET DU PARTAGE DE CONNAISSANCES DE LA CHERCHEUSE MAHÉE GILBERT-OUIMET, DE L'UNIVERSITÉ DU QUÉBEC À RIMOUSKI (UQAR).
La violence à caractère sexuel en milieu de travail désigne « tout comportement ou acte de nature sexuelle non désiré exercé dans le contexte professionnel, qui a pour effet de porter atteinte à la dignité, à l’intégrité ou au bien-être de la personne ciblée ». Elle comprend plusieurs comportements, incluant des gestes, paroles, regards ou insinuations pouvant aller jusqu’à l’agression sexuelle. Ces actes contribuent à créer un environnement de travail intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant.
Pourquoi s’en soucier ?
Se soucier de la violence à caractère sexuel en milieu de travail est essentiel, car elle représente une atteinte grave à la dignité, à la santé mentale et physique des victimes, et à l'intégrité du climat professionnel. Ce type de violence, qu'elle soit explicite ou insidieuse, crée un environnement de travail hostile. Elle peut se manifester à plusieurs niveaux :
Sur le plan organisationnel :
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Climat de méfiance et d'anxiété au sein de l'entreprise ;
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Impact sur la productivité ;
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Augmentation de l’absentéisme et du présentéisme ;
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Augmentation du taux de roulement du personnel ;
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Conflits internes et division du personnel.
Sur le plan individuel :
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Troubles psychologiques : stress post-traumatique, anxiété généralisée, troubles de l’humeur ;
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Symptômes physiques et émotionnels : stress, dépression, troubles du sommeil, fatigue chronique, crises d’angoisse ;
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Baisse de l’estime de soi, accompagnée de honte ou de culpabilité ;
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Isolement social et professionnel, par crainte de ne pas être cru·e ou d’être confronté·e à l’agression ;
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Problèmes de santé physique : maux de tête, douleurs musculaires, troubles digestifs et autres manifestations liées au stress ;
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Difficulté à concilier vie professionnelle et personnelle.
Quelles sont les causes principales ?
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Déséquilibres de pouvoir : la violence sexuelle survient fréquemment dans des contextes où une personne détient un pouvoir formel ou informel sur une autre (hiérarchique, économique ou symbolique). L’auteur-e peut utiliser sa position pour intimider, manipuler ou obtenir des faveurs sexuelles.
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Culture organisationnelle tolérante ou permissive : une culture qui banalise les comportements sexistes, les blagues déplacées ou les stéréotypes de genre peut favoriser l’émergence de la violence sexuelle.
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Manque de sensibilisation et de formation : le manque de connaissances sur ce qui constitue un comportement inapproprié peut faire en sorte que les auteur-e-s ne réalisent pas la portée de leurs gestes. Les victimes peuvent également ignorer leurs droits ou ne pas savoir comment réagir ou à qui se confier.
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Climat de travail toxique ou dysfonctionnel : une ambiance de travail tendue, compétitive ou marquée par des conflits peut favoriser l’émergence de comportements déviants, dont la violence sexuelle.
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Sexisme systémique et stéréotypes de genre : les inégalités entre les sexes et les stéréotypes peuvent légitimer certains comportements et en invisibiliser d'autres.
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Isolement ou manque de supervision : les milieux de travail où les interactions ne sont pas supervisées (ex. : travail de nuit, déplacements professionnels, postes isolés) sont plus à risque. Les personnes isolées peuvent avoir moins de soutien ou de témoins.
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Peur des représailles ou de ne pas être cru-e : la peur d’être jugé-e, de perdre son emploi, ou de nuire à sa carrière peut inciter les victimes à se taire, ce qui permet à la violence de se perpétuer. Ce climat de silence protège les agresseurs-euses et empêche la mise en place de mécanismes de prévention efficaces.
Comment y faire face ?
La violence à caractère sexuel en milieu de travail peut être efficacement prévenue et contrôlée par des stratégies combinant identification et sensibilisation. En plus des exemples d’interventions de prévention liées à la violence conjugale ou familiale, voici d’autres approches que l’employeur peut mettre en place en cas de violence à caractère sexuel :
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Encourager le signalement en mettant en place une personne-ressource dédiée pour traiter les dénonciations de manière confidentielle ;
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Sensibiliser les employé-e-s aux manifestations de violence à caractère sexuel, aux notions de consentement, et aux procédures de signalement, tout en intégrant ces notions dès l'accueil des nouveaux membres du personnel ;
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Fournir des informations actualisées sur les ressources d’aide locales.
En conclusion, la violence à caractère sexuel en milieu de travail ne doit pas être ignorée, car ses conséquences sont profondes et multiformes. La prévention et l’intervention rapide sont essentielles pour protéger les employé-e-s, maintenir un environnement de travail respectueux et éviter des répercussions à long terme pour l’organisation.
Pour en savoir plus, voici d'autres ressources que vous pouvez consulter en complément d'informations:
- Risques psychosociaux : quels sont les risques ciblés par la Loi modernisant le régime SST ?
- Risques psychosociaux : la violence au travail
- Risques psychosociaux : la violence conjugale ou familiale au travail
- Risques psychosociaux : quels sont les risques « émergents » ?
Sources :
- CNESST : Violence à caractère sexuel en milieu de travail
- Pelletier, M., Lippel, K., Vézina, M. (2018). La violence en milieu de travail. Dans J. Laforest, P. Maurice et L. M. Bouchard (dir.), Rapport québécois sur la violence et la santé. Québec : Institut national de santé publique du Québec.
- Gilbert-Ouimet, M. (co-première auteure), Hervieux, V. (copremière auteure), Truchon, M., Bernard, G., Thibeault, J., et Lachapelle, É. (2024). Répertoire des pratiques organisationnelles pour réduire les risques psychosociaux du travail. Université du Québec à Rimouski, Université Laval