
POUR RÉDIGER CET ARTICLE, NOUS AVONS BÉNÉFICIÉ DU SOUTIEN ET DU PARTAGE DE CONNAISSANCES DE LA CHERCHEUSE MAHÉE GILBERT-OUIMET, DE L'UNIVERSITÉ DU QUÉBEC À RIMOUSKI (UQAR).
La violence conjugale ou familiale en milieu de travail peut être définie comme « toute situation où la violence exercée au sein de la sphère intime ou familiale d’un individu affecte son environnement professionnel, que ce soit directement ou indirectement. Elle peut inclure des abus physiques, psychologiques, sexuels, financiers ou verbaux perpétrés par un-e partenaire intime ou un membre de la famille ».
Pourquoi s’en soucier ?
Outre les exigences imposées par la modernisation de la Loi SST, il est indispensable de veiller à la présence de violence conjugale ou familiale au sein des milieux de travail, car ces situations entraînent bien souvent des répercussions significatives, touchant non seulement les employé-e-s directement concerné-e-s, mais aussi leurs collègues et l'ensemble de l'organisation. Pour ne citer que quelques exemples, la violence conjugale ou familiale peut se manifester sur les milieux de travail de différentes manières.
Au niveau organisationnel :
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Par des heures supplémentaires effectuées (visant à trouver refuge dans son travail) ;
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Des interruptions anormales de tâches au travail pour des raisons personnelles ;
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Une augmentation de l’absentéisme et du présentéisme ;
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Un risque accru d'accidents ou de conflits sur le lieu de travail.
Au niveau individuel :
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Un changement significatif de comportement (anxiété, nervosité, fatigue) ;
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Des troubles de santé mentale tels que la dépression, la détresse psychologique, les symptômes de stress post-traumatique ou encore les idées suicidaires ;
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Des troubles musculosquelettiques ;
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Un problème soudain d’assiduité.
Cette violence peut se produire à la fois sur et en dehors du lieu de travail. Ses impacts peuvent traverser les frontières professionnelles, affectant la santé mentale, physique et émotionnelle des personnes victimes. Par exemple, des appels et messages incessants de la part du partenaire violent, sa présence répétée sur le lieu de travail pour surveiller ou intimider la victime, des menaces ou agressions physiques près du bureau ou dans le stationnement, ou encore des tentatives d’isolement en empêchant la victime de socialiser avec ses collègues ou de participer à des activités professionnelles.
Quelles sont les causes principales ?
Les causes de la violence conjugale ou familiale sont souvent enracinées dans des dynamiques relationnelles, sociales et psychologiques complexes. Parmi les causes principales entraînant des répercussions sur la vie professionnelle, on peut retrouver :
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Le déséquilibre de pouvoir au sein du couple, où un partenaire exerce un contrôle abusif sur l'autre ;
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Des facteurs individuels tels que le stress, des troubles de santé mentale, ou une exposition antérieure à la violence ;
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Les facteurs économiques, comme une dépendance financière ou des difficultés liées à l'emploi ;
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L’isolement social de la victime, souvent renforcé par la honte ou la peur des conséquences sociales, réduite empêche le recours à des ressources d’aide extérieures, y compris en milieu professionnel ;
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Les facteurs professionnels, tels que des horaires de travail atypiques, le manque de flexibilité ou un environnement de travail toxique peuvent également contribuer à la gravité de la situation, en rendant la victime encore plus dépendante de l'agresseur-se et en limitant son accès à des ressources de soutien.
Comment y faire face ?
Pour faire face à la violence conjugale ou familiale entraînant des répercussions en milieu de travail, il est crucial pour les employeurs d’adopter une démarche proactive basée sur l’identification, la sensibilisation et le soutien. Parmi les interventions de prévention possibles, notons quelques exemples :
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Définir une politique de tolérance zéro, avec des conséquences claires pour les auteurs-trices. La politique doit être diffusée, comprise et régulièrement mise à jour pour rester pertinente ;
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Élaborer des mesures de prévention comme des dispositifs de sécurité et des inspections régulières, et effectuer un suivi constant des risques ;
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Simplifier les procédures de signalement, garantissant confidentialité et absence de représailles ;
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Offrir du soutien aux victimes, notamment en proposant des aménagements de travail flexibles et des congés payés pour permettre les consultations ou démarches judiciaires. Il est également suggéré de diriger les victimes vers des ressources spécialisées pour un soutien adapté ;
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Former et sensibiliser régulièrement tous les membres du personnel, y compris pour les gestionnaires, à la reconnaissance et aux mécanismes de signalement de la violence conjugale ou familiale. Des ressources informatives peuvent être partagées pour renforcer cette sensibilisation et encourager le signalement en cas de besoin ;
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Créer des partenariats avec des organismes spécialisés afin de faciliter l’accès à des services de soutien pour les victimes.
Il nous paraît essentiel de rappeler que l’employeur, bien qu’il joue un rôle clé dans la prévention et le soutien, ne remplace pas les professionnel-le-s qualifié-e-s en violence conjugale, qui restent les principales personnes intervenantes pour accompagner les victimes.
Pour en savoir plus, voici d'autres ressources que vous pouvez consulter en complément d'informations:
- Risques psychosociaux : quels sont les risques ciblés par la Loi modernisant le régime SST ?
- Risques psychosociaux : la violence au travail
- Risques psychosociaux : la violence à caractère sexuel au travail
- Risques psychosociaux : quels sont les risques « émergents » ?
Sources :
- CNESST : Violence conjugale ou familiale
- Gilbert-Ouimet, M. (co-première auteure), Hervieux, V. (copremière auteure), Truchon, M., Bernard, G., Thibeault, J., et Lachapelle, É. (2024). Répertoire des pratiques organisationnelles pour réduire les risques psychosociaux du travail. Université du Québec à Rimouski, Université Laval